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« Mettre en scène, c'est être à la tribune »

 

Atypique, l’itinéraire de Violaine ARSAC (1992 PO) l'est incontestablement. Issue des rangs de l'IEP, elle termine ses études avec un DESS de Communication à Paris lorsqu’elle prend son premier cours de théâtre. Alors que son parcours professionnel semble tout tracé, cette expérience fait basculer sa vie. Quelques années plus tard, à 27 ans, elle met un terme à son activité professionnelle en entreprise pour débuter son parcours théâtral, d’aborden tant que comédienne. Aujourd’hui metteur en scène, elle promeut notamment un théâtre citoyen à travers la compagnie Le Théâtre des Possibles.

Comment passe-t-on des bancs de l'IEP à la scène ?

A 18 ans, j'ai intégré Sciences Po Grenoble parce que ces études m’intéressaient réellement, mais sans savoir dans quelle direction précise je souhaitais orienter ma vie professionnelle. Il en a été de même lorsque j’ai choisi mon troisième cycle. Mais lorsque j’ai mis un pied dans un cours de théâtre, au départ simplement pour en faire en tant que loisir, j’ai su le jour même que ma vie était là. Cela a été pour moi une forme de révélation, alors que je n’y avais jamais pensé auparavant.
Je me suis donc formée pendant trois ou quatre ans afin d’apprendre le métier, tout en exerçant une activité professionnelle en entreprise afin de gagner ma vie. Mais je savais dés le départ que dés que je serais prête, j’allais me lancer, ce que j’ai fait.


Lorsque vous avez fait ce choix radical, quel regard a-t-on porté sur vous ?

Ma décision a suscité beaucoup d'étonnement, voire de l’inquiétude, auprès des personnes extérieures au monde artistique : mes camarades rencontrés à l’IEP, mes collègues de travail, certains proches. C’est vrai que c’est un choix de vie : c’est un milieu où il n’y a ni CDI,ni sécurité de l'emploi. Et naturellement, à l’époque, comparer mon salaire de comédienne de théâtre en début de parcours à celui de mes camarades de promotion de l’IEP, diplômés depuis quelques années, ne jouait pas en ma faveur, vous vous en doutez ! Mais je savais que c’était un risque à prendre. Et je ne l’ai jamais regretté.


Diriez-vous qu'il est possible de déceler des liens entre vos études et votre activité artistique ?

Tout à fait ! Si j’ai choisi d’étudier à l’IEP, c’est parce que je me sentais concernée par le monde qui m’entoure. Et c’est toujours le cas. Depuis 5 ans maintenant, je suis metteur en scène et les pièces que je choisis de créer défendent un regard sur le monde. C’est souvent une forme de théâtre qu’on pourrait qualifier de citoyen. Avec des textes contre les discriminations, pour la liberté d’expression, etc.
Cet engagement artistique me permet, dans la continuité de mes études à l'IEP, de m'exprimer. Être metteur en scène, c'est être à la tribune. Comme unefemme politique lors d’un discours, je choisis ce qui va être dit, quels mots vont être portés sur scène. En fonction de ce que je souhaite partager à un instant t de ce que traverse notre monde. Et au vu des dernières années ou des derniers mois, je ne crois pas que je vais pouvoir m’arrêter dans l’immédiat.


Le statut des intermittents du spectacle est remis en cause. Qu'est-ce que cela vous inspire ?

Au sein des compagnies pour lesquelles je travaille, nous sommes tous intermittents du spectacle. Ce statut est précieux. Il a certainement besoin d'être réformé, mais avec du bon sens et de l’intelligence. Je sais qu’une image faussée est parfois véhiculée à propos de notre activité. En ce qui me concerne, je ne connais pas d’intermittent payé à ne rien faire. En revanche, je connais beaucoup d'intermittents qui ne sont pas forcément rémunérés pour leur travail. Si ce statut était supprimé, on tuerait une forme de créativité, aux dépends d’une culture unique et d’avantage formatée. Il faut trouver le moyen de le sauvegarder. Il est un des piliers de la richesse et de la diversité de la création théâtrale de notre pays.


En conclusion, à un étudiant de l'IEP qui souhaiterait emprunter le même chemin que vous, que lui diriez-vous ? "Vas-y, fonce" ?

Sans hésiter, oui ! Aujourd’hui je suis en tournée avec « Tant qu’il y a les mains des hommes », ma dernière création sur l’identité que nous venons de jouer non seulement en province, mais aussi au Lycée français de San Francisco et au Théâtre de l’Ile à Nouméa. Donc je ne vais pas vous dire le contraire !
Ce n'est ni facile, ni gagné d'avance. Il faut de la ténacité et de la persévérance. Mais si c’est un choix viscéral et si on est sûr de son envie, il faut la suivre.
Comme dirait René Char : « Impose ta chance, sers ton bonheur et va vers ton risque : à te regarder, ils s’habitueront. »


Un dernier mot ?

Il n'y a pas de théâtre sans public, donc, s'il vous plait, continuez d’aller au théâtre !

http://www.tant-qu-il-y-a-les-mains-des-hommes.com/Accueil.html


Propos recueillis en majeure partie par Emmanuel Samaniego.



Violaine ARSAC
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25/05/2016


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