Philippe
TORMENTO (1985, SP)
Quelle est votre formation ?
À Grenoble, j’avais opté pour la filière service
public et j’envisageais de préparer les concours. Et puis
les circonstances en ont décidé autrement. Dès la
sortie de l’IEP, j’ai eu l’opportunité d’entrer
dans la vie active. Cela ne m’a pas empêché d’approfondir
avec un DEA d’administration publique à l’UER de droit
de Grenoble, puis avec un DESS de gestion et de management des collectivités
territoriales à l’IEP de Lyon où j’ai continué
à donner régulièrement des heures d’enseignement.
Plus tard, mes fonctions à la tête des services médico-sociaux
du Département de la Vendée m’ont conduit à
mettre en place deux diplômes d’Etat d’assistant de
service social et d’éducateur spécialisé et
à former les futurs jeunes professionnels à l’Ecole
Supérieure des Métiers du Social. En Haute-Savoie où
je suis actuellement en poste, le Conseil général vient
de mettre en place avec Sciences Po Grenoble un Master « Autonomie
et services à la personne » dans le champ du grand âge
et du handicap. C’est tout l’intérêt de concilier
travail et formation : partager son expérience et s’enrichir
de celle des autres.
Et votre parcours professionnel ?
Au lendemain des élections législatives en 1986, j’ai
fait mes premières armes à l’Assemblée Nationale
comme attaché parlementaire avant d’entrer en cabinet ministériel
pour être conseiller technique. Par la suite, j’ai dirigé
le cabinet du Président de la Région Rhône-Alpes,
Charles Millon, avant de retrouver le Parlement en intégrant le
groupe parlementaire des Républicains Indépendants au Sénat
comme conseiller auprès de son Président Henri de Raincourt
qui est devenu ministre de la coopération.
C’est au début des années 2000 que Dominique Perben,
alors ministre de la justice et maire de Chalon-sur-Saône m’a
proposé de prendre la direction de son cabinet. Entre temps, j’avais
exercé un mandat électif municipal dans la Drôme dont
je suis originaire. Après plus d’une dizaine d’années
passées dans les sphères politiques, j’ai souhaité
évoluer. Cette nouvelle orientation m’a conduit à
prendre la direction générale des services sociaux du Département
de la Vendée en 2008 et à travailler au côté
de Philippe de Villiers. Avec la découverte d’un nouveau
métier et d’un nouveau territoire. Enfin, en 2011, j’ai
été sollicité par le Département de la Haute-Savoie
pour prendre la responsabilité de la direction générale
des services de l’action sociale et de la solidarité. C’est
un retour aux sources pour le rhônalpin que je suis.
Dans toutes ces expériences, quel est
le fil conducteur ?
J’ai eu la chance d’exercer des fonctions variées,
de connaître notre pays sous différents visages, et de faire
des rencontres marquantes. Cultiver ses racines, se remettre en cause
et, chaque fois, s’adapter au contact de réalités
nouvelles, c’est ça le fil conducteur.
En quoi consistent vos fonctions actuelles ?
Directeur général des services départementaux en
charge de l’action sociale et de la solidarité, j’ai
la responsabilité de 1000 professionnels sociaux et médico-sociaux
et d’un budget de 300 millions d’euros, le plus important
de la collectivité. Notre mission est d’accompagner les 750
000 Haut-Savoyards à tous les âges de la vie, qu’il
s’agisse de la protection maternelle infantile, de la prévention
spécialisée, de la protection de l’enfance, de l’insertion
sociale et professionnelle, du logement, de la santé, ou bien encore
du grand âge et du handicap. La durée côtoie l’urgence.
On est au carrefour de tout, depuis le management à la formation,
en passant par la gestion budgétaire et la veille juridique, sans
oublier l’observation des besoins et l’évaluation des
politiques publiques. Le social est un domaine souvent méconnu
et sujet à stéréotype. En réalité,
c’est très concret : un toit, un emploi, une formation, une
aide alimentaire, un soutien à domicile, une mesure de protection,
un accompagnement éducatif, un agrément pour une adoption,
une vaccination, etc. Derrière chaque numéro de dossier,
nous veillons à ne jamais oublier qu’il y a une vie.
Que vous apporte votre métier ?
Agir au service des plus fragiles et des plus démunis est une leçon
d’humilité quotidienne. On apprend à se taire pour
écouter et observer avant d’agir. Rien de mieux pour garder
les pieds sur terre. Et puis, faire quelque chose qui a un sens, quelque
chose d’utile, cela compte.
À quoi vos études à l’IEP
vous ont-elles servi ?
Pour apporter les bonnes réponses, il faut d’abord se poser
les bonnes questions, au contraire des experts qui confondent conviction
avec certitude. Sciences Po, c’est une méthode : apprendre
à apprendre, et savoir aller à l’essentiel. C’est
aussi un état d’esprit : donner libre cours à sa curiosité
sans s’interdire le moindre sujet. J’aimais bien cette approche
éclectique.
Si vous aviez un message pour les étudiants
de l’IEP ?
Les diplômes sont un moyen, pas une fin. Plus que d’expertise,
c’est d’abord de bon
sens dont nous avons besoin. Et pour ça, rien ne remplacera jamais
deux outils
indispensables qu’on ne trouve ni dans les grandes écoles,
ni dans les universités : le
« pifomètre » et le « trouillomètre ».
Philippe TORMENTO
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