Olivier Monnot, 1995
PO
Entré à l'IEP de Grenoble en 1992 après un bac
économique, Olivier Monnot (PO95) a ensuite intégré
le Centre de Formation des Journalistes (CFJ) de Paris avant d'entamer
une carrière dans la presse. Mais en 2008, après dix ans
de carrière, ce passionné d'aviation, pilote privé
d'avion depuis 2000, saisit une opportunité pour se lancer dans
une reconversion professionnelle pour faire du pilotage son métier
et de son rêve d'adolescent une réalité.
Des études dans un Institut d'Etudes Politiques,
ça mène à tout, il suffit de parcourir l'annuaire
des anciens pour s'en convaincre. Le parcours plutôt original d'Olivier
Monnot, qui vient de commencer une carrière de pilote de ligne,
n'en est qu'une confirmation.
Passionné d'aviation depuis son adolescence, il fait une croix
sur la carrière de pilote de ligne au lycée, sa myopie l'empêchant
d'obtenir la visite médicale des pilotes professionnels. Plus littéraire
que scientifique, Olivier obtient un bac économique avant de passer
les concours des IEP. Quand il arrive sur le campus de Saint-Martin d'Hères
en 1992, il veut faire du journalisme. Il choisit donc la filière
« Politique », et après avoir obtenu son diplôme
de l'IEP en 1995, il passe et réussit le concours du Centre de
Formation des Journalistes (CFJ), rue du Louvre à Paris. Il en
sort en 1997 et travaille plusieurs années comme journaliste, d'abord
en presse écrite, avant de passer à la presse en ligne.
Parallèlement, toujours titillé par l'appel des cieux, il
commence en 2000 une formation de pilote privé d'avion en région
parisienne. En 2001, il obtient son PPL (Private Pilot Licence), les licences
aéronautiques étant devenues européennes depuis 1999.
Au départ de l'aérodrome de Lognes, en région parisienne,
Olivier emmène régulièrement en week-end amis et
collègues en avion, par exemple pour deux ou trois jours au calme
sur l'île d'Yeu, en Vendée, qui possède un aérodrome
que l'on rejoint en deux heures de vol seulement depuis Paris, s'affranchissant
à la fois des embouteillages et de la traversée en bateau.
Il a l'occasion de piloter dans le Nevada et en Californie, allant notamment
se poser
sur un aérodrome situé sous le niveau de la mer, dans la
Vallée de la Mort, lors de vacances aux Etats-Unis. Il effectue
également deux voyages en avion léger en Afrique, en convoyant
un aéronef de Paris jusqu'en Mauritanie, et en participant au rallye
Toulouse-Saint-Louis du Sénégal, qui fait parcourir chaque
année à une quinzaine d'avions d'aéroclub le mythique
trajet de la Ligne de l'Aéropostale des années 20 et 30.
Des regrets à la reconversion
Olivier écrit un livre dans lequel il raconte ses vols. Un de ses
amis, pilote de ligne chez Air France, étant l'auteur d'un ouvrage
intitulé « Le plus beau bureau du monde », Olivier
choisit de titrer le sien « Le ciel est notre terrain de jeu »,
puisqu'à défaut de faire du ciel son lieu de travail, il
a la possibilité d'y passer une partie de son temps de loisirs.
A chaque fois qu'il emprunte un avion d'Air France, Olivier se présente
à l'embarquement comme pilote privé, et demande s'il peut
aller faire un tour dans le cockpit. Souvent, ça marche, et il
fait ainsi de nombreux atterrissages dans le poste de pilotage, installé
sur le strapontin situé juste derrière la console centrale
de l'avion, entre les deux pilotes. Chacun de ces séjours dans
le cockpit l'enthousiasme, mais fait aussi poindre le regret, de plus
en plus fort, de n'avoir pu y accéder à titre professionnel.
Depuis l'instauration des licences aéronautiques européennes,
les normes médicales ont évolué, et il est vraisemblable
que sa myopie n'empêcherait plus Olivier d'obtenir la visite médicale
des pilotes professionnels. Mais une reconversion à son âge
impliquerait de financer la coûteuse formation, les voies gratuites
(dont la célèbre Ecole Nationale de l'Aviation Civile) n'étant
accessibles qu'aux plus jeunes.
Au printemps 2008, Olivier est responsable éditorial d'une petite
société Internet qu'il a créée en 2002 avec
deux amis, et au capital de laquelle un gros acteur du Web est entré
l'année précédente. Ce dernier propose aux trois
fondateurs de racheter les parts qu'il leur reste. La situation économique
de la petite société nécessitant deux départs,
Olivier se porte volontaire, voyant là l'opportunité rêvée
de se lancer, à 34 ans, dans sa reconversion professionnelle :
son licenciement économique lui donne le temps libre pour la formation,
et le rachat de ses parts lui permettant d'en financer la plus grosse
partie.
Un an et demi de formation
En juillet 2008, deux gros cartons sont livrés chez lui, plein
de près de 15 kilos de livres en anglais, dont il va falloir lire,
comprendre et apprendre le contenu pour passer les examens de la licence
théorique de pilote de ligne. Un challenge pas si évident
pour un titulaire du bac économique, alors que la plupart de ceux
qui passent ces examens ont un bac scientifique, et pour beaucoup, ont
fait Maths Sup et Maths Spé, et souvent une école d'ingénieur
dans la foulée. Après huit mois de travail à la maison,
Olivier valide la dernière des 14 matières de l'examen.
Il part pour l'Angleterre pour suivre la partie pratique de la formation
et décroche successivement sa qualification de vol aux instruments,
puis son brevet de pilote professionnel.
A peine rentré en France, direction Perpignan pour y suivre une
formation d'instructeur à l'issue de laquelle Olivier commence
à former des pilotes privés dans un aéroclub de la
région parisienne, tout en cherchant un emploi de pilote. Après
quatre mois de recherche, il obtient une promesse d'embauche, mais deux
autres formations sont nécessaires avant de pouvoir la concrétiser.
Une trentaine d'heures de cours théoriques et 20 heures dans un
simulateur de Boeing 737 pour la formation au travail en équipage,
et une qualification sur le type d'avion qu'il va piloter, un King Air,
avion américain biturbopropulseur pouvant emporter deux pilotes
et une dizaine de passagers.
Enfin, le 30 mars dernier, dix ans presque jour pour jour après
son premier vol d'élève pilote, Olivier décolle de
l'aéroport du Bourget avec un commandant de bord à sa gauche
et des passagers derrière. Depuis, il sillonne la France et l'Europe
proche (Angleterre, Allemagne, Suisse, Espagne, Italie, Portugal...) pour
transporter des passagers ou du fret urgent, afin d'augmenter ses heures
de vol pour pouvoir ensuite passer sur un avion plus gros. Le plus souvent,
ses vols sont des missions « EVASAN » qui lui rappellent son
engagement de sapeur-pompier volontaire : du rapatriement sanitaire et
du transport d'organes destinés à des greffes. Après
dix ans d'activité professionnelle et un an et demi de formation,
Olivier a réussi sa reconversion et a réalisé son
rêve d'adolescent. Le ciel n'est plus seulement son terrain de jeu,
mais est désormais devenu son bureau. Et il mesure la chance qu'il
a - quelle que soit la période de l'année et la météo
- de pouvoir, à chaque jour de travail, voir le soleil après
avoir percé les nuages…
Olivier MONNOT (PO 95)
Interview tirée du Magazine n°44 (Décembre 2010)