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« Le choix de l’éclectisme »

 

Céline GITON (2002, PO)

Entrée directement à l’IEPG après le bac, Céline Giton ne voit pas l’Institut seulement comme le moyen d’obtenir un diplôme et d’accéder à un emploi ; son passage à l’IEPG lui donne surtout le goût d’apprendre, l’ouverture d’esprit, la passion de l’éclectisme. Son diplôme en poche, elle s’inscrit en licence de Lettres modernes et en DEA d’Histoire des relations et interactions culturelles internationales. Egalement attirée par le journalisme, elle renonce finalement au Celsa, dont elle avait réussi le concours d’entrée, lorsqu’elle découvre les métiers de la culture et du livre.

« Passionnée par l’international, j’ai passé un an à Vancouver pendant mes études à l’IEPG, et découvert peu à peu qu’il existait de nombreux organismes, notamment associatifs, dont l’objectif était de promouvoir le livre à l’international, depuis l’AFAA jusqu’à Culture et développement à Grenoble. Puis mes stages m’ont sensibilisé à un autre aspect de la question : la promotion des littératures et des écrivains étrangers en France. J’ai rédigé un mémoire sur ce thème en DESS et passé plusieurs mois de stage à la Résidence d’écrivains européens Villa Mont Noir et au Festival America de Vincennes en 2004. Ces expériences m’ont transformé ».

Renonçant à une opportunité de volontariat international au Bureau du livre de l’Ambassade de France à New Delhi, Céline Giton intègre en 2004… la Maison de Jules Verne à Amiens. Si le cadre est moins exotique, la renommée de Jules Verne, écrivain français le plus traduit dans le monde, lui offre de nombreuses occasions de voyager et de nouer des contacts internationaux. « Travailler à la promotion de Jules Verne s’est révélé extrêmement enrichissant, car c’est un auteur qui a parlé du monde entier et abordé des thèmes innombrables. Il intéresse tout le monde, peut-être plus à l’étranger qu’en France d’ailleurs. Je me suis retrouvée à organiser un voyage d’études au Canada et un colloque à Genève, à participer à une Foire internationale au Luxembourg, à collaborer à des projets d’expositions en Norvège, au Québec, en Russie… Mon poste d’administratrice/assistante littéraire comprenait des activités variées : coordonner le secrétariat de rédaction de la Revue Jules Verne (semestrielle), développer une librairie-boutique, superviser un fonds documentaire riche de 30 000 documents, organiser des soirées et des manifestations littéraires et scientifiques, gérer les ressources humaines et le service administratif d’une petite structure. Cette polyvalence m’a énormément plu. »

Toutefois, le changement de majorité à la mairie d’Amiens lors des élections de 2008 vient tout remettre en cause. La Maison de Jules Verne doit repasser en régie directe sous la direction de la bibliothèque municipale, la marge de liberté d’action se réduit considérablement. « Travailler dans une association culturelle demande beaucoup d’investissement personnel, d’énergie et de disponibilité en soirées et en week-end, pour un salaire modeste ! En contrepartie, on dispose d’une importante marge de manœuvre pour impulser et mener les projets et monter des partenariats variés, dans des laps de temps parfois très courts. Pour moi, cette liberté était essentielle. Or sitôt que la situation de l’association a été remise en cause, l’ambiance s’est détériorée et notre liberté réduite. J’ai donc pris la fuite ! ».

Direction le sud-est, au Festival du premier roman de Chambéry, où Céline Giton arrive en 2009. Une expérience enrichissante qui lui permet de mieux connaître la création littéraire contemporaine, mais tourne court au bout de quelques mois, faute de subventions pour un recrutement permanent. « Les associations culturelles passent leur temps à jongler au niveau budgétaire. Dès qu’elles veulent développer leurs projets et embaucher, la question de l’argent pose problème. Et le mécénat culturel, au moins en France, s’intéresse principalement aux grosses structures, aux projets de grande envergure. Trop souvent, les petits structures, qui emploient moins de vingt salariés et disposent d’un budget inférieur à 1 million d’euros, ne les intéressent pas. »

Consciente qu’il s’agit d’un problème structurel, qui a peu de chance de s’améliorer en temps de crise économique, Céline Giton décide de se concentrer sur ses propres recherches, en particulier la thèse consacrée à l’Unesco, entamée au Centre d’histoire de Sciences-Po Paris en 2005. Elle donne alors des conférences sur les maisons d’écrivain, Jules Verne, l’Unesco, et remanie son mémoire de DESS, qu’elle publie en 2010 sous le titre Littératures d’ailleurs. Histoire et actualité des littératures étrangères en France (l’Harmattan). Un an plus tard, elle sort aux éditions du Castor astral une anthologie consacrée à Jules Verne, Le Bestiaire extraordinaire. L’objectif est de montrer l’écrivain sous un nouvel éclairage en insistant sur son actualité, à l’aide d’extraits choisis pour leur poésie, leur humour, leur engagement écologique… Puis en 2012, après sept années de doctorat, c’est enfin la soutenance de sa thèse portant sur « La politique du livre de l’Unesco, 1945-1974 », sous la direction de Jean-François Sirinelli. « Si c’était à refaire, je ne sais pas si j’aurais le courage d’entreprendre à nouveau un tel projet. Travailler sur les archives d’une organisation internationale est une entreprise titanesque ! La quantité de documents à lire, presque entièrement en anglais et en espagnol, la complexité d’étudier un espace mondial pendant une période aussi complexe que les années 1950 à 1970, la nécessité d’étudier un contexte foisonnant allant des fondations américaines au Pen Club international, des ONG aux politiques nationales de différents pays, tout cela m’a demandé un énorme travail et des lectures nombreuses et diversifiées. Mais quelle satisfaction d’être arrivée au bout ! Je travaille maintenant à la publication de la thèse, qui pourrait avoir lieu au printemps 2014… ».

En parallèle, Céline Giton s’installe fin 2011 à l’Honor de Cos, dans les collines du sud-Quercy, où elle monte sur trois hectares le gite « La Ferme des Lettres » dans une ancienne ferme qu’elle rénove progressivement, avec l’objectif de la transformer un jour en résidence d’écrivains. En attendant, elle adhère à la Société des Gens de Lettres et continue de s’investir dans des associations comme Les Lettres européennes et la Fédération des maisons d’écrivain et des patrimoines littéraires. Elle a aussi plusieurs livres en chantier.

« Je travaille à un second livre sur Jules Verne et à la mise en forme de ma thèse pour une publication grand public. Mais j’ai aussi d’autres projets, en particulier un essai sur la littérature mondiale et un roman qui se passe dans une résidence d’écrivains en Chartreuse. J’ai toujours voulu écrire, au fond, je me suis toujours senti écrivain. Pour m’amuser, j’ai feuilleté l’annuaire 2012 des anciens de l’IEPG par fonctions ; j’ai relevé moins d’une douzaine d’auteurs et d’écrivains, sur plus de 12 000 diplômés… C’est dommage, car je trouve que la formation de l’IEPG est un atout pour l’écriture ; elle est riche de pistes de réflexion et de thématiques à explorer, en histoire, en géopolitique, en sociologie, en science politique, en administration publique… J’ai gardé de mon passage à l’IEPG une capacité d’analyse et de synthèse et une façon de décrypter le monde environnant dans son ensemble qui m’aident dans mon travail d’écriture et de recherche, ainsi qu’un goût pour la pluridisciplinarité. J’ai d’ailleurs commencé un roman autour d’Apollinaire qui s’intitule, selon une phrase du poète, C’est bien plus drôle quand ça change ». C’est une philosophie…

 

Céline GITON
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17/06/2013


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