Florence DENIER ép. PASQUIER (1991 SP), Vice-Présidente - Représentante au CESE - Juriste Environnement - Association FNE (France Nature Environnement).
L'environnement, domaine de prédilection
N’ayant pourtant pas baigné dans une famille militante, je
sais que l'environnement est ma vocation depuis mes 15-16 ans. Aucune
formation abordant directement les problématiques environnementales,
je suis séduite par la formation que propose l’Institut d’Etudes
Politiques de Grenoble, d’autant plus au vu de sa proximité
avec les montagnes. L'environnement toujours en ligne de mire, j’oriente
mes travaux au sein de l’IEP sur les aspects sociopolitiques de
la protection de l'environnement et obtiens mon diplôme en 1991.
J’intègre ensuite un DESS “Aménagement urbanisme,
collectivité territoriale, environnement” qui mêle
le droit et la géographie à l’université de
Nantes. Mon mémoire de DESS porte sur l’application de la
loi sur l’eau de 1992 et un projet de schéma d'aménagement
de gestion de l’eau d’une rivière du Maine-et-Loire.
Voilà mon premier pied dans le droit de l’eau et des milieux
aquatiques, qui demeure aujourd’hui ma spécialité.
N’avoir peur d’aucun sujet
Mes années d’enseignement à Grenoble m’ont aidé
à sortir de ma timidité. Mais surtout, ce que Sciences Po
Grenoble m’a appris, c’est de n’avoir peur d'aucun sujet.
On nous a fait travailler sur tous les sujets, des humanités aux
statistiques, ce qui m’a servi à de nombreuses reprises dans
ma vie professionnelle.
Le droit environnemental
J’ai travaillé pendant 3 ans sur le sujet « droit de
l’eau et politiques locales » dans le cadre d’un doctorat
qui a été interrompu en raison de tensions avec mon directeur
de thèse. Aujourd’hui, je pense qu’il est important
de souligner qu’un parcours professionnel n’est pas forcément
linéaire. Il peut y avoir des cassures qui peuvent apparaitre,
au premier abord, comme des échecs. Mais, ces cassures peuvent
être aussi fécondes : d’une part, cette recherche m’a
permis d’acquérir une connaissance approfondie du droit de
l’eau et d’autre part, elle m’a permis de rencontrer
des militants juristes de France Nature Environnement. Ces derniers me
font découvrir une autre facette du droit, en dehors du monde académique.
Il m'apparaît alors sous son aspect pratique, permettant la création
d’un rapport de force politique, une “machine de guerre contentieuse”
pour empêcher des projets destructeurs de l’environnement.
C’est une boîte à outils formidable que je décide
de mettre en œuvre dans la suite de ma vie professionnelle.
Une vie professionnelle variée…
Depuis 25 ans, je suis à la fois auteure, formatrice et conférencière
spécialisée dans les politiques publiques de l’eau
et des milieux aquatiques. L’enjeu de cette triple casquette est
de transmettre à des publics très variés (fonctionnaires
territoriaux, élu.es, agriculteur.ices…) des connaissances
techniques sur les enjeux d’une gestion équilibrée
de l’eau. Penser et inventer la gouvernance de ce bien commun me
permettent d’accompagner ces agents de terrain dans une bonne appréhension
de leurs nouvelles compétences dans les domaines environnementaux.
Je rédige aussi pour un éditeur juridique des fascicules
sur le droit de l’eau, dans ses différentes dimensions. Le
plus récent porte sur la gestion quantitative de l’eau :
quelles sont les règles qui permettent de faire face collectivement
aux conséquences du bouleversement climatique du cycle de l’eau ?
…en dialogue avec un fort engagement associatif
Je m’engage en parallèle au sein du mouvement FNE de mon
département, le Maine-et-Loire, et rejoins son réseau juridique
national et participe à le structurer. Je m’implique dans
des dossiers contentieux sur divers sujets tels que le droit de l’urbanisme,
la protection de la biodiversité ou la gestion de l’eau.
Épaulée par d’autres juristes, nous avons remporté
de nombreuses victoires contentieuses.
Nommée représentante de FNE au sein du Conseil Économique,
Social et Environnemental (CESE) en 2010, après le Grenelle de
l’Environnement, je conduis en 2013 un avis sur la gestion et l’usage
de l’eau dans l’agriculture, en lien avec mes expériences
et expertises professionnelles. Puis je deviens également membre
du Comité national de l’eau où je siège depuis
10 ans. Je participe, à haut niveau, à l’élaboration
des politiques nationales de l’eau et des milieux aquatiques et
au suivi de leur mise en œuvre. Mon investissement sur les évolutions
juridiques, politiques, les types d’études à mener
sur les territoires pour mieux gérer les enjeux eau et climat.
L'objectif est de co-construire avec les acteurs nationaux les meilleures
orientations possibles de la politique de l’eau et des milieux aquatiques,
toujours en s’appuyant sur des connaissances scientifiques complexes
et évolutives. Cette activité de plaidoyer national me permet
de porter les valeurs et la parole de la plus grande fédération
d’associations de protection de l'environnement française
dans les hautes sphères décisionnelles. Elle nécessite
beaucoup de persévérance pour, par exemple, proposer une
trajectoire de sobriété en eau ou pour intégrer les
besoins des milieux aquatiques dans les nouvelles règles du partage
de l’eau.
Une carrière atypique
Mon parcours s’est construit en slalom entre mes activités
professionnelles et associatives qui se nourrissent l’une et l’autre.
Ma forte spécialisation sur la dimension aquatique m’a obligée
à acquérir des savoirs scientifiques pour participer à
l’élaboration d’une partie du droit de l'environnement,
ce droit du XXIe siècle qui nous obligent à penser les limites
des ressources naturelles et à nous adapter aux conséquences
du changement climatique.
Avec du recul, je dois une grande partie de ma carrière à
mon engagement bénévole au sein de France Nature Environnement.
Je suis fière de mon parcours et de ce que nous avons pu apporter
collectivement depuis 30 ans. Même s’il reste des combats
à mener pour une juste application ou éviter des régressions,
les objectifs de protection des milieux aquatiques ont pleinement intégré
le droit de l’eau et les politiques publiques aquatiques.
Interview réalisé par Louise NEMERY,
étudiante
Afficher
leur courriel
17/04/2025





























































































































































































































































































































































































































































































































