Julie Payet, Org-int
2006
Elle a parcouru des milliers de kilomètres pour trouver sa
voie. Alors qu'elle se destinait à un métier dans les relations
internationales, Julie Payet a emprunté des chemins détournés
pour atteindre son objectif. Retour sur un parcours atypique qui a récemment
débouché sur un poste au sein du Ministère français
de la Santé.
Lorsqu'elle
intègre l'IEP de Grenoble en 2004, Julie Payet a déjà
quelques années d'études derrière elle. En provenance
directe de l'Université McGill au Canada, où elle a étudié
les sciences politiques et obtenu un Bachelor of Arts, elle avait auparavant
passé deux ans en école de commerce en France. Pour ce faire,
elle avait alors dû quitter son île natale, la Réunion
: à l'époque, elle souhaitait faire du commerce international
et ce type d'école n'existait pas encore sur l'île. Pour
des raisons financières, elle n'a pu terminer son cursus, et c'est
à l'Université McGill qu'elle a choisi de se rendre pour
poursuivre ses études. Là-bas, elle assiste alors à
des cours de relations internationales qui lui plaisent tellement qu'elle
décide de reconsidérer son orientation professionnelle :
les relations internationales, c'est la possibilité de parler plusieurs
langues ; c'est aussi une ouverture d'esprit sur les différents
systèmes politiques, culturels, sociaux et économiques.
On comprend mieux le monde dans lequel on vit. A son entrée à
l'IEPG, elle croit alors savoir de quoi son avenir sera fait : «
Je voulais revenir en France et surtout travailler dans les relations
internationales. J'ai intégré Sciences Po directement en
quatrième année dans le master OIG / ONG. Le programme et
les cours présentés sur les plaquettes paraissaient très
intéressants. De plus, le master proposait des partenariats avec
des organisations internationales telles que l'ONU ».
De son parcours à l'IEP, elle retiendra surtout les stages qu'elle
y a effectués : « J'aurais aimé plus de pratique et
moins de théorique, moins de cours magistraux mais plus de travaux
en groupe. J'ai trouvé dommage que nous devions assister à
des cours dont la matière nous était déjà
connue à travers nos études passées. Il serait plus
motivant pour les élèves de n’assister qu’aux
cours pour lesquels ils n’ont pas de connaissances. Mes deux stages
m'ont confirmé que les relations internationales et les langues
étaient mon domaine ». Ses deux stages ? Pour le premier,
elle est allée dans la ville de Sucre, en Bolivie. Avec l'Alliance
Française, un réseau d'associations implantées dans
des dizaines de pays et attachées à promouvoir la langue
et les cultures françaises et francophones de par le monde, elle
a occupé le poste de chargée de communication. Quelques
mois plus tard, c'est du côté de l'Italie que la globe-trotteuse
se rendra, plus précisément au centre de formation de l'OIT
(Organisation Internationale du Travail). Ici, elle est assistante de
chargées de mission pour la protection sociale, qui interviennent
notamment auprès de représentants (syndicats, patronats,
ministères du travail voire de la santé) de pays en développement.
De ces stages, Julie Payet retirera qu'il y a plusieurs façons
d'entrer dans les relations internationales : « Le recrutement se
fait par deux voies : la voie nationale d'une part ; la voie du terrain,
auprès des ONG d'autre part. De mon côté, j'ai fait
le choix de la voie nationale, c'est-à-dire d'intégrer l'administration
française » . Par ailleurs, « ce n'est pas parce que
l'on n'entre pas au Ministère des Affaires étrangères
maintenant qu'on ne peut pas faire une carrière dans l'international
! L'important est de garder en tête ses objectifs et de persévérer
».
Motivée par l'international, Julie Payet l'est. Mais c'est vers
une autre voie qu'elle décide de se tourner à l'issue de
ses deux années de master. Cette voie, c'est le secteur de la santé
publique : « J'ai fait une rencontre décisive en Italie lors
de mon
stage. J’y ai rencontré un expert de l’OMS (Organisation
Mondiale de la Santé). A travers le témoignage de cette
personne, j’ai compris combien la santé conditionnait le
développement de tout un chacun. Quelqu’un de malade trouvera
plus difficilement du travail que quelqu’un en bonne santé,
par exemple. A cette époque, je cherchais à donner un sens
à ma carrière. Je savais que l’international me transportait,
mais faire de l’international pour de l’international ne me
suffisait pas. Je souhaitais me sentir utile. Réalisant combien
la santé était centrale à la suite de cette rencontre,
j’ai compris que je ne me sentirais pleinement utile que si je travaillais
dans ce domaine. En développant une expertise dans ce secteur,
j'espérais d'ailleurs intégrer l'OMS ».
La Réunionnaise choisit alors de rester une année supplémentaire
à l'IEP de Grenoble pour intégrer la prep'ENA. Objectif
: intégrer l’Ecole des Hautes Etudes en Santé Pubique
(EHESP) ou le Ministère de la Santé. Elle échouera
aux différents concours d'entrée qu'elle tentera et s'envolera
finalement pour la Réunion où elle sera recrutée
par une société d'économie mixte spécialisée
dans le développement durable et la coopération régionale...
mais pour quelques mois seulement.
En effet, alors qu’elle travaille sur son île, l'IRA de Lyon
la rappelle et lui apprend qu'elle est admise. Consciente que ce concours
lui permettrait d’intégrer le Ministère de la Santé
ou le Ministère des Affaires étrangères, elle choisit
de revenir en métropole. Au terme de son année de formation,
elle parvient à choisir le Ministère de la Santé.
Recrutée en septembre 2009 à la Direction de la Sécurité
Sociale (DSS), elle occupe désormais un poste de rédacteur
dont la mission principale est le suivi de la coordination et des coopérations
des soins de la ville : « Je suis des expérimentations lancées
par le Ministère pour améliorer la qualité des soins
de ville et lutter contre les déserts médicaux. Il s'agit
d'accompagner la mise en place d'expérimentations qui, si elles
sont concluantes, pourraient être généralisées
à l'échelle nationale. Ce poste me permet de travailler
à la fois avec des administratifs, des hommes de terrain (professionnels
de santé) ou encore des économistes de la santé :
c'est une bonne façon d'avoir une vision précise du paysage
sanitaire français. En outre, travailler à la DSS constitue
pour moi un réel atout en ce qu’elle nous invite à
apprécier le risque maladie dans son ensemble. En effet, la santé
n’y est pas seulement considérée comme un besoin de
la population ; elle est également présentée comme
un enjeu financier de taille, susceptible de menacer la pérennité
même de notre système de sécurité sociale.
C’est cette vision englobante qui fait à mes yeux la richesse
de la DSS au sein du Ministère de la Santé ».
Une formation de qualité, un travail épanouissant... Julie
Payet est désormais posée et ne demande plus qu'à
maîtriser et acquérir une certaine expérience sur
son nouveau poste. Son prochain objectif : acquérir une expertise
suffisante pour la mettre au service de l'OMS. A suivre…
Jean-François LAURENT
Etudiant
Interview tirée du Magazine n°44 (Décembre 2010)