Benoit
LE PAPE (2006 EF), Analyste Financier chez Btg Pactual (Londres)
Quand Stéphane m'a contacté pour me demander de faire le portrait de mon ô combien illustre carrière, j'ai tout d'abord été surpris car je me suis demandé en quoi cela pouvait intéresser des étudiants qui se destinaient pour la plupart à la haute fonction publique, à une carrière politique, ou à des professions de le domaine social, en tous cas jamais aux carrières mercantilistes et purement matérialistes de finance de marché. Loin de moi l'idée de les en persuader.
Ma vie professionnelle (hélas!) a peu à voir avec le Loup de Wall Street… Les années faciles sont passées et ne reviendront vraisemblablement pas. Il s'agit de métiers très exigeants et la volatilité que doit y subir le salarié n'est pas toujours facile à vivre au quotidien. Mes proches (épouse, parents, amis… fils de 8 mois…) en témoigneront. Donc je me suis dit que si l'étudiant de l’IEP sortait de sa bulle d'épanouissement grenoblois pour se plonger dans les questionnements sur sa future vie professionnelle, autant faire en sorte qu'il en retire trois petits éléments à méditer.
Premièrement je lui dirai de suivre les leçons du bon vieux Ricardo et qu’il ne faut ne pas hésiter à se spécialiser. N'ayez pas peur des niches. Personnellement, j'ai choisi les obligations convertibles, une micro-niche, mais qui m'a permis de survivre. Le monde a besoin d'expert. Les CV trop facilement génériquables ont une faible espérance de vie.
Deuxièmement, évitez les boites prestigieuses qui estiment que vous avez de la chance de bosser pour elle. Les acteurs de seconde zone offrent souvent des carrières sympa et vous pourrez faire votre place au soleil plus facilement que dans les écuries de Formule-1. Vous pourrez plus facilement y optimiser votre courbe d’utilité loisir-travail. A 25 ans, on est prêt à mourir pour son job. A 35 ans un peu moins…
Troisièmement, soyez cynique avec l'employeur qui va vous recruter. Les entreprises, tout comme les Etats, sont confrontés à une précarisation incroyable de leur puissance et les leaders en un domaine peuvent se voir challenger en l'espace de 6 mois. Renseignez-vous donc un maximum sur votre employeur, prenez votre temps, et faites en sorte de ne pas confier le début de votre carrière a une supernova. Méfiez-vous de Malthus, les rentes fondées sur la pénurie ne durent jamais très longtemps. Pour cela, le marché est votre ami. Rien de tel qu'un petit tour par le rapport annuel, une petite note de broker pour comprendre si votre future boite doit rembourser sa dette pendant 5 ans ou si elle est cartonne sur de nouveaux horizons.
Ensuite, c'est à vous de jouer. Ne rougissez pas
de votre diplôme d'IEP Grenoble, il vous offre une ouverture unique
sur le monde, et une capacité incroyable à rebondir si par
hasard vous devriez vous reconvertir. Une carrière ça dure
longtemps et des vagues schumpetérienne de destruction créatrice,
vous devrez en surfer plus d’une. J'en ai maintenant terminé,
l’étudiant peut retourner à son insouciance et profiter
des cours de géopolitique ou d’histoire des idées
entre deux cessions de ski au collet d'Allevard.
Benoit LE PAPE
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