Luc
BOYER (1988 EF), Conseiller Financier pour l'Afrique de l'Ouest anglophone,
Ambassade de France au Nigéria
J'ai effectué ma scolarité à l'IEP de 1985
à 1988. Après l’IEP, direction Berlin au
46ème Régiment. Ma vie allemande se prolonge quelques années
après avec un poste d’attaché commercial auprès
du Consul général à Hambourg (1999-2002), puis par
la participation au prestigieux séminaire franco-allemand entre
les deux ministères des finances.
Puis Retour à Paris, DEA de science politique à La Sorbonne. Abandonné en cours de route car j’avais pris pour thème une comparaison entre les régimes de RDA et de Roumanie alors que le communisme d’Etat s’effondrait. Ensuite recrutement d’abord en 1990 comme chargé de mission au Ministère de l'industrie des télécommunications et des postes (mission sur le développement des PME agricoles entre l'Allemagne et la France) puis à la Direction des Relations économiques extérieures en 1991. Je commence une carrière alternée entre "Bercy" et l’international.
Spécialisation « pays difficiles » (Arabie Saoudite, Nigéria aujourd’hui-le seul pays vraiment "agréable" où j’ai séjourné a été l’Indonésie) et suivi , en administration centrale (Trésor), des questions concernant la zone MENA, la sécurité financière (perspective Gafi/Tracfin), les sanctions, le droit de l’investissement pétrolier, les relations économique israélo-palestiniennes (la France assure le secrétariat des accords de Paris entre les deux entités), le boycott des produits israéliens, la coopération financière contre les réseaux terroristes islamiques. J'ai aussi été responsable des accords bilatéraux de protection des investissements en administration centrale et "chaise" française en charge de l'investissement à Bruxelles (ex-Comité 133), à l'OCDE et à la CNUCED. En Iran, j'ai participé à produire du « droit international » sur les personnalités et entités privées sanctionnées tout en essayant de maintenir les intérêts français dans l’automobile notamment. La question de l’émergence d’une classe moyenne et très cultivée exclue du système politique a été la question centrale à laquelle j’ai assisté au moment du mouvement vert de 2009.
Dans mon poste de conseiller financier à l'Ambassade de France d'Abuja où je suis depuis août 2012, je m'emploie à faire connaître le Nigéria aux entreprises et aux administrations françaises et à nouer des relations de diplomatie économique avec le géant africain. La France est une alliée de taille du Nigéria pour lui permettre de se rapprocher des pays francophones du continent.
Le Nigéria et ses 170 millions d'habitants veut se positionner comme le "Brésil de l'Afrique". Il s'agit de la première économie du continent (510Md$ de PIB) et de la 26ème puissance économique mondiale en termes de PIB (derrière l'Argentine et devant l'Afrique du sud). Pour la France, travailler dans le cadre d'un partenariat diplomatique avec le Nigéria doit permettre (i) d'orienter les pays de la zone Franc vers un schéma économique plus libéral, mais aussi (ii) de sortir de son face à face avec les pays de ce que l'on appelait encore il y a peu, le "pré-carré", (iii) de travailler avec un partenaire de poids qui lui permette de rééquilibrer ses relations avec l'Union africaine, actuellement dominée par l'Afrique du sud.
Les trois questions centrales du Nigéria me paraissent celle de la mise en place d’une gouvernance politique débarassée de la corruption ; le mystère du développement économique « intouché » par la violence (qu’elle soit criminelle, islamiste ou néo-cultiste) et finalement celle de la possibilité pour de vieilles cultures africaines (les Haoussas et les Yoruba sont parmi les principales ethnies du continent avec respectivement 70 et 40 millions de locuteurs, les Igbo ont une 15zaine de millions de locuteurs) à se développer sans disposer d’un référentiel culturel relativement unifié (contrairement au Rwanda ou à l’Ethiopie).
J’ai une vie sentimentale beaucoup plus linéaire que ma carrière. Je suis marié à Hajiba depuis 22 ans. Elle est marocaine d’origine. Je ne l'aurais pas rencontré si je n'avais pas connu Fathallah Sijilmassi auquel revient toute ma gratitude. Notre fils Jonas a 20 ans et étudie à…l’IEP de Grenoble.
Je considère que mes études à l'IEP m'ont appris à apprendre, à être créatif intellectuellement (perspective comparatiste), à anticiper les situations politico-économiques, géopolitiques et sociales (l’économie pure n’est qu’un mirage).
Elles m'ont aussi permis de connaître des gens formidables. Je suis ainsi resté en contact avec d'anciens élèves de l’IEP tels qu'Arnaud Duranson (PSA), Frédéric Caille (prof de sciences-po à Chambéry), Fathallah Sijilmassi (Ambassadeur du Maroc), Pascal Servy (directeur des achats chez Elis), les « frêres » Thomas (pilotage de chasse puis poète) et Benoît Besch (directeur financier d’une société) et Yann Hwang (Conseiller des affaires étrangères). Je suis aussi en relation avec des anciens de l'IEP de la nouvelle génération telle que la journaliste Nassira El Moaddem ou l'administrateur civil au Trésor Armel Castets avec lequel j'ai récemment eu l'occasion de préparer la visite ministérielle de Pierre Moscovici au Nigéria.
A une époque d’ajustement économique de l’Europe par rapport au monde émergent, si je devais donner un conseil aux élèves actuels de l'IEP, ce serait, de s'ouvrir à « l'outre-occident » et d'apprendre impérativement, en plus de leur cursus à l'IEP, une langue orientale (arabe, russe, persan, swahili, langue asiatique ou turc).
Luc BOYER
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