Pierre
QUIBLIER (1986 PS - DEA Et. Pol. 1987)
20 ans déjà que je travaille au sein du Programme des Nations Unies pour l’Environnement dans le développement et la mise en œuvre des politiques environnementales et de développement durable. Et pourtant, jamais je n’ai étudié ce sujet durant tout le cursus de sciences politiques. Il fallait attendre encore quelques années avant que nos chefs d’Etat se réunissent à Rio en 1992 pour reconnaitre que l’environnement était devenu une force majeure dans les relations internationales, que cela nécessitait un changement radical dans la conduite des politiques et des relations économiques internationales, et que seule la convergence des objectifs économiques, sociaux et environnementaux pouvait tracer la voie d’un développement durable que nul décideur aujourd’hui du leader politique ou d’entreprise, au scientifique ou consommateur ne peut ignorer.
Après le DEA d’études politiques de l’IEP, je saisi l’opportunité de compléter ma formation par un MBA à l’Université de Fordham, New York qui offrait alors une spécialisation relativement unique dans la gestion des medias. J’obtiens dans le même temps un stage à plein temps à ABC News au sein du magazine télévisé d’information hebdomadaire « Prime Time Live ». Je poursuis l’expérience avec ABC, après la « graduation », avec mon premier emploi en tant qu’assistant de production au sein du tout nouveau journal quotidien de la nuit « World News Now ». Une expérience exceptionnelle au cœur des médias américains qui m’offre du balcon de sa fabrique à informations parfaitement huilée, une vue imprenable sur la société américaine et sa perception du monde.
C’est avec cette expérience dans les médias que je rentre, quelques mois après le sommet de la terre de 1992, comme chargé de liaison au bureau du PNUE de New York afin principalement de promouvoir la mise en œuvre d’agenda 21, le plan d’action du développement durable adopté à Rio. C’est ainsi que pendant dix années, je prépare la rédaction de rapports et de déclarations et couvre l’ensemble des négociations intergouvernementales d’importance pour le PNUE incluant, l’Assemblée Générale, le Conseil économique et social et la Commission du développement durable. Je noue également des coopérations et des partenariats avec les missions diplomatiques représentés à New York ou avec les secteurs académique, privé ou de la société civile de la région Nord-américaine pour promouvoir la sensibilisation et l’action en faveur de l’environnement.
Mon expérience au PNUE se poursuit à Genève ou je suis détaché à l’Organisation Mondiale de la Santé dans le cadre d’une coopération spécifique de deux ans pour renforcer les liens entre l’environnement et la santé. Ainsi, il s’agit maintenant de traduire en terme pratique les politiques et les objectifs longuement négociées dans les salles de réunions New Yorkaise. C’est le passage du politique au technique - comment réconcilier les approches fragmentaires sur le terrain. Non sans quelques réticences d’experts irascibles, nous démontrons la valeur stratégique d’une approche commune sur les questions santé et environnement et proposons une méthodologie et un ensemble d’outils d’aide à la décision afin de valoriser et de traduire la connaissance scientifique en arguments de type économique pour exercer un plus grand impact sur le processus de prise de décision.
Je rejoins en 2006 notre bureau des produits chimiques pour développer cette approche dans un partenariat avec le PNUD qui vise à intégrer la gestion des produits chimiques dans les politiques de développement. Dans cet esprit, en 2012, j’initie et coordonne également la publication du « Global Chemicals Outlook », la première publication de ce genre qui met en évidence le lourd fardeau économique que représentent les substances chimiques, en particulier pour les pays en développement. En examinant les tendances mondiales en matière de produits chimiques et leurs implications économiques, le rapport cartographie les approches les plus efficaces afin d'aider les décideurs politiques à tenir leurs engagements.
Dans le même temps, sur la base des travaux et des liens tissés avec les collègues de l’OMS, nous convainquons les ministres africains en charge de la santé et de l’environnement de se réunir les 28 et 29 août 2008 à Libreville à l’occasion de la première Conférence Interministérielle sur la Santé et l’Environnement en Afrique. 52 pays africains signent la Déclaration de Libreville qui les engagent sur 11 actions et à établir une Alliance Stratégique Santé et Environnement. Le mouvement créé à Libreville a catalysé un dialogue intersectoriel sans précédent générant une nouvelle dynamique d’action coordonnée pour une réponse plus rapide et efficace aux menaces environnementale d’ordre nationale et continentale.
Ainsi je ne peux regretter les années passées à l’IEP qui ne m’ont pas préparé spécifiquement, dans les politiques de l’environnement et du développement durable car je suis convaincu qu’une hyper spécialisation dans un domaine scientifique unique n’aurait pu suffire pour me fournir les capacités et compétences nécessaires dans le passage de ces étapes et l’accomplissement de ces taches multiples et variées mais somme toute complémentaires qui caractérisent mon parcours.
Le premier emploi reste un défi considérable
à surmonter. L’hyperspécialisation établit
peut être un lien plus directe entre formation et emplois. Mais
son immédiate utilité est-elle durable dans un monde en
rapide et constante mutation? C’est bien l’approche généraliste
et pluridisciplinaire propre à la formation de l’IEP qui
m’a été la plus utile et déterminante pour
appréhender la pluralité des perspectives, pour comprendre
la connexion entre les facteurs politiques, économiques, sociaux
et culturel ainsi que les interactions entre outils scientifiques, technique
et juridiques qui définissent et répondent aux questions
aussi complexes que celles qui visent à établir une équation
entre paix et sécurité, développement économique
et social et protection de l’environnement. C’est en ce sens
que la formation offerte par l’IEP est un atout majeur qui ne se
contente pas de former des experts aux formules d’hier, mais qui
équipe ses étudiants pour faire face aux enjeux à
venir et répond aux attentes des acteurs responsables du monde
de demain.
Pierre QUIBLIER
Afficher
son courriel
14/03/2014