Louise BIANCHI (Master DPC 2010), Responsable de production, Théâtre National de Strasbourg
Quel est ton parcours universitaire ?
J’ai commencé mon parcours par une Licence en Histoire de l’art à l’Université
Lyon II, et je l’ai poursuivi avec un Master I en Histoire de l’art contemporain,
que j’ai obtenu en 2008.
Au cours de ce Master, j’ai choisi de faire une année de césure aux États-Unis,
pour effectuer un stage au service des relations avec les publics du Théâtre
de Los Angeles (Center Theatre Group). Ce stage, complété par d'autres
expériences au Théâtre de la Croix-Rousse à Lyon et au Conseil Général
de l'Isère, m'a permis de déterminer que je souhaitais m'orienter vers
la direction de projets culturels davantage que vers la recherche en Histoire
de l’art. C'est à ce moment-là que j'ai découvert l'existence du Master
DPC.
En première année DPC, j'ai effectué un stage au sein
de la Métropole de Lyon, à la Mission insertion culture, portée par la
Maison de l’Emploi et de la Formation. Le programme visait à accompagner
les bénéficiaires du RSA vers l'emploi par la mise en œuvre d'actions
culturelles. J'ai effectué un rapport d'évaluation sur la mission.
En deuxième année, je suis retournée aux États-Unis pour un stage à la
Smithsonian Institution, une des rares institutions culturelles publiques
américaines, qui regroupe 50 musées à Washington DC. J’ai travaillé à
l'Anacostia Community Museum, alors Musée National Afro-Américain, implanté
au cœur d'un quartier prioritaire. Mon stage s'est déroulé au sein du
service des expositions, au moment où les missions du Musée étaient en
cours de redéfinition.
Ces expériences, combinées avec les cours de Science Po, m'ont permis
de préciser mon intérêt pour les questions de démocratisation et de décentralisation
culturelle.
Après sciences Po, comment t’es-tu lancée dans
le monde du travail ?
A ma sortie de Sciences Po, je n'ai pas trouvé directement de travail
salarié dans la culture (cela a pris 1 an et demi !). Tout en ayant un
travail alimentaire, j’ai monté à Lyon un festival dédié à la jeune création
contemporaine dans un quartier politique de la ville. Nous avons créé
une résidence à ciel ouvert avec 50 jeunes artistes, et je garde un excellent
souvenir de ce projet, monté avec très peu de moyens.
En 2012, j'ai été recrutée à la Comédie de Valence, Centre Dramatique
National, pour coordonner la Comédie itinérante, un programme de décentralisation
théâtrale déployé dans les communes rurales, les maisons de quartier,
les établissements de santé et pénitentiaires de Drôme et d'Ardèche. Les
compétences acquises à Sciences Po ont été un atout pour ce poste qui
nécessitait de collaborer avec les élu.e.s et les collectivités du territoire
au quotidien.
Ce premier contrat au sein d'un lieu de création et de diffusion m’a permis
de découvrir les processus de production du spectacle vivant. C'est ainsi
que j’ai souhaité me rapprocher de la création.
J'ai alors postulé en tant qu’Administratrice de production et de diffusion
au Théâtre National de Strasbourg en 2016. Stanislas Nordey venait d'en
prendre la direction et voulait faire du TNS une maison de production
et de création, en accompagnant 24 artistes associé.e.s. Il souhaitait
valoriser les textes d’auteur. ice.s vivant.e.s, ouvrir le théâtre et
l'école (le TNS est aussi une École nationale de théâtre) à davantage
de diversité, et déployer un mode d'accompagnement des équipes artistiques
coopératif. Après trois ans, j'ai été promue Responsable de production,
et c’est le poste que j’occupe aujourd’hui.
En parallèle de mon travail en institutions, j’ai voulu continuer à travailler pour des projets émergents et des structures indépendantes. En dix ans j'ai accompagné le développement et la structuration de plusieurs compagnies de théâtre, groupes de musiques actuelles et projets culturels de territoire.
Présente-nous un projet que tu as réalisé et
qui t’a particulièrement marqué.
Le Théâtre National de Strasbourg a conçu le projet Esch2022 | Un
territoire de théâtre pour demain pour Esch2022 – Capitale européenne
de la culture. J'en ai été la cheffe de projet. Nous avons élaboré deux
programmes transfrontaliers dédiés à la jeunesse.
Notre proposition visait à accompagner la transition du territoire transfrontalier
de la Capitale européenne par un programme d'actions pour que le théâtre
vienne raconter et faire bouger les lignes de questions sociétales brûlantes,
mettre en avant des récits manquants, permettre aux jeunes d'interroger
le monde d'aujourd'hui et d'inventer celui de demain.
Nous avons articulé Esch2022 avec Ier Acte, un programme
national initié en 2014 par Stanislas Nordey, les Fondations SNCF et Rotschild,
en lien avec le Festival d'Avignon, la Colline, l'Odéon et le CCN2 de
Grenoble pour promouvoir une plus grande diversité sur les plateaux de
théâtre. A Esch, nous avons impliqué une centaine de jeunes dans une aventure
théâtrale d'envergure, menée par des artistes du TNS dont certain.e.s
étaient issu.e.s de Ier Acte.
Nous avons construit le projet en collaboration avec de multiples partenaires
en charge des politiques publiques, ainsi que les acteurs culturels et
sociaux du territoire.
Ce projet a été très enthousiasmant car il a concentré et concrétisé les
différents angles du projet sur lequel nous avons travaillé au TNS.
Quel est ton avis sur le Master direction de
projets culturels ?
Je suis ravie d'avoir intégré l'IEP et le Master DPC. En plus de m'avoir
apporté une solide formation universitaire qui me sert quotidiennement
dans ma pratique professionnelle, le Master m'a donné les cadres nécessaires
à la compréhension des politiques publiques culturelles. Et puis j'ai
pu garder des liens avec nombre de mes camarades du Master, dont plusieurs
sont restés des ami.e.s et certain.e.s sont même devenus des collaborateur.ice.s
et des collègues de travail.
Interview réalisée par Chloé BRINDOS (étudiante
3A)
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09/01/2023