Cyril PESENTI, 2021 DPC
Que diriez-vous de votre parcours à Sciences Po Grenoble et qu’êtes-vous venu chercher au sein de cette formation ?
Mon premier lien avec Sciences Po Grenoble s’est établi en 2018 à l’occasion de ma candidature au parcours « Direction de Projets Culturels ». En réalité, je n’ai intégré DPC qu’un an plus tard ; un contrat à l’Opéra national de Paris m’avait été proposé entre temps. Après être passé par Radio France, l’Opéra National de Lyon et celui de Paris, un Master de Musicologie Fondamentale et Appliquée en poche, je n’avais toujours pas changé de cap : il me fallait intégrer le cursus grenoblois. À cette étape, j’avais la ferme volonté de me former sur un certain nombre d’enjeux des politiques culturelles. Avec le recul, je crois également qu’il s’agissait d’une porte de sortie pour moi, une façon de ne pas me confronter trop rapidement à la réalité concrète du milieu professionnel dans lequel j’évoluais. Lorsque l’on est jeune, on a souvent peur de rompre avec le milieu ; on ne devrait pas. Intégrer le parcours « Direction de Projets Culturels » reste encore aujourd’hui l’une des aventures les plus belles de ma formation, tant sur le plan humain que sur le plan intellectuel. Ces deux années ont été marquées par des rencontres essentielles et déterminantes ; celles de camarades devenu.e.s de proches ami.e.s, celles d’enseignant.e.s devenu.e.s d’inspirants modèles.
D’aussi loin que remonte ma passion pour la musique et l’opéra, je n’ai cessé de questionner leurs modèles de transmission. Au fil des années, d’abord en tant que spectateur, puis de l’autre côté de la salle, dans les coulisses, au sein des services de production, communication, réalisation et dramaturgie. J’ai observé, étudié, interrogé. Je dois dire que mon année parisienne avant d’intégrer Sciences Po Grenoble a été déterminante sur le plan de mes attentes vis-à-vis de la formation. La réalisation de mon mémoire sur la médiation « jeunes publics » à l’Opéra national de Paris m’avait clairement montré le chemin qu’il restait à parcourir pour arriver à construire une réflexion cohérente sur l’ouverture de l’opéra au plus grand nombre. Aller à la rencontre et questionner les personnalités du milieu lyrique n’a pas été suffisant pour étancher ma soif de comprendre ce qui se jouait dès lors et ce qui, d’ailleurs, se joue toujours aujourd’hui. Je me suis employé à lire les rapports de l’Observatoire des politiques culturelles et des Forces Musicales, à appréhender les récentes loi LCAP et loi NOTRe, à étudier leurs répercussions sur le secteur pour finalement remettre en perspective les potentiels apports des droits culturels. Il était nécessaire de mettre de l’ordre dans ma façon de comprendre des enjeux plus transversaux à d’autres échelles et prendre du recul sur la situation. En ce sens, la formation « Direction de Projets Culturels » s’est avérée à la hauteur de mes attentes. Je ne peux pas dire que je suis venu y chercher des réponses. Je suis venu pour me poser les bonnes questions.
Comment se sont déroulées les deux années de formation à Sciences Po Grenoble et qu’en retenez-vous ?
Ces deux années ont été particulières à plus d’un titre, d’une rare intensité et d’une grande richesse humaine. Ma première année a été ponctuée par la réalisation d’un rapport sur l’opéra aujourd’hui et l’opéra demain, sorte de projection par application plus directe de nouveaux modes de gouvernance. Dans ce rapport, j’ai questionné la potentialité de donner au théâtre une autre dimension : en faire un véritable lieu de vie, un espace citoyen d’échanges, de partages et de débats. J’ai également compris une nouvelle facette des droits culturels ; ils endossent un rôle tout à fait révolutionnaire si l’on s’intéresse à leur application concrète ; le paradigme de l’oeuvre n’est plus au centre, celui de la personne le devient. Depuis, je n’utilise que très peu le terme de « publics ». Je n’aime pas vraiment cette expression. Je préfère parler des personnes. J’ai effectué un stage en production à Venise au Palazzetto Bru Zane. Le confinement a eu raison de tout mais la solidarité entre étudiants et étudiantes nous a, je pense, permis de tenir bon. Je trouve sincèrement qu’expérimenter un autre pays durant ses études est une magnifique façon de se redécouvrir et de questionner son identité.
De retour en France, ma deuxième année a été marquée
par l’enseignement à distance. Là encore, l’entraide et l’humanisme si
chers à notre promotion ont permis de limiter la casse, de plus, nos enseignants
et enseignantes étaient tout à fait impliqué.e.s et ne nous ont pas lâché.e.s.
J’ai effectué un second stage aux Forces Musicales, syndicat professionnel
des opéras et des orchestres en France. Cette expérience, sans doute la
plus riche en apprentissages de mes années de formation, m’a offert la
possibilité de plonger au coeur des problématiques du réseau. J’ai terminé
mon parcours à Sciences Po Grenoble avec la remise de mon mémoire sous
une forme de correspondance. Dans le même temps, en août 2021, j’ai rejoint
l’équipe de l’Opéra de Rouen Normandie. Mon passage à l’IEP de Grenoble
m’a forgé. J’ai appris à développer de manière plus significative une
série de ressources pour trouver ma voie. Imaginer qu’une telle formation
nous ouvre toutes les portes est une erreur. Non seulement car nous sommes
les seuls à pouvoir ouvrir ces portes mais aussi et surtout car ce n’est
nullement la finalité du projet. Au sein du parcours « Direction de Projets
Culturels », on m’a appris à penser par moi-même, ce qui, paradoxalement,
a aussi été une façon de penser à travers tout ce qui m’entoure. Voici
toute la richesse de ces années.
Cyril PESENTI
Afficher
son courriel
24/03/2022