Benjamin SPORTOUCH (PO 1999)
« Je suis passionné par les gens »
Que font ces gens, assis à côté ? De quoi parle ce vieux couple qui se promène ? A quoi pense le cuistot de ce restaurant italien en attendant ses premières commandes ? Quand Benjamin Sportouch ne peut pas obtenir de réponses, il se projette, et se raconte des histoires, emporté par la curiosité. On dit souvent du quarantenaire, diplomé de Sciences Po Grenoble, qu’il “aime les gens”. Nous avons rendez-vous en terrasse, coincés sur un minuscule trottoir. La table est petite, mais l’endroit propice aux bavardages. Discuter dans un bureau austère, ou entre deux rendez-vous millimétrés, il évite autant qu’il peut. Que ce soit à la radio ou sur son temps libre, le cannois d’origine cultive la discussion, qu’il essaie de rendre intime. Même lorsque qu’il est le sujet de l’entretien, l’animateur du Grand Jury, sur RTL, pose autant de questions qu’il ne donne de réponses.
Il faut quelques secondes au journaliste parisien pour se remémorer ses jeunes années passées à l’IEP. Viennent en premier ses impressions sur cette ville si hétéroclite qui l’a accueilli temporairement : « C'était dynamique et jeune. Pour moi Grenoble, c'était rencontrer des gens très différents. » Déjà une manière journalistique d'aborder ses études. Le jeune cannois avait l’impression d’étudier au cœur de tout, dans un cadre privilégié. Il parle de la structure de l’IEP, « situé au cœur de l’université », qu’il voit comme « une forme de passerelle » donnant sur tout le campus. « C'était important pour moi de ne pas être isolé ». Cette architecture, au sens figuré cette fois, lui permettait d’être suivi, encadré, proche des enseignants.
L’animateur d’RTL parle de la capitale des Alpes comme une ville profondément politique. « C'est le creuset de ce qui se fait de meilleur et de pire », commente-il en pensant à la corruption, l’affaire Carignon en tête. Tout laisse penser que Sciences Po Grenoble était son premier choix. Il n’en est rien. Sportouch se livre cash, avec une moue rieuse : « Non. Je n’ai pas eu Strasbourg, ni Paris. Et on m’a toujours dit que Grenoble était moche en plus ».
Le journalisme politique est pour lui une évidence. Depuis petit, il s’intéresse à ceux qu’il considère comme étant « l’histoire en marche ». Ces personnages si singuliers et ces grandes histoires l'animent. « Il y a un côté romantique dans la politique. Et puis ce sont eux qui décident de notre destin, qu’on le veuille ou non ». Mais pas question de passer du côté des professionnels de la vie publique. « Je n’étais pas assez discipliné. C’est un milieu où il faut avoir des certitudes, et je n’en avais pas assez. Je doute beaucoup ».
Le doute, il en a fait son métier. Et c’est sur la radio qu’il jette son dévolu. « Je faisais une émission politique, qui s’appelait 6 et demi sur 7. C'était un clin d’oeil à 7/7, la référence médiatique de l’époque. On diffusait sur radio Brume (NDLR : Aujourd’hui Radio Campus). Il y avait 5 auditeurs mais j’adorais ». Lui et un ami avaient même reçu le maire de Grenoble, une fierté. Il réussit le concours du Celsa et quitte l’IEP pour s’installer à Paris. « J’étais très stressé à l’idée de ne pas trouver de boulot. Donc toutes les opportunités étaient bonnes à prendre ». Quitte à travailler pour Maxi, un magazine féminin. Ou quitte à changer radicalement d’avis. Benjamin Sportouch soigne la formulation « Je n’étais pas le plus assidu aux cours. Surtout aux cours d'agence ». Lui qui ne voulait pas devenir agencier restera 10 ans en poste, et y apprendra “presque tout”. Il passera ensuite 4 ans à l’Express, en faisant parallèlement des chroniques sur France Inter. Enfin de retour sur les ondes, ce qu’il préfère.
Le très fraîchement promu Rédacteur en Chef du service politique de RTL prévient ceux qui veulent devenir journaliste : « Il faut en avoir vraiment envie. On ne peut pas réussir sans taper aux portes et sans oser. C’est un métier qui se précarise beaucoup. Et surtout, ne jamais avoir de plan de carrière, au risque d’être déçu ».
Lui ne l’a pas été. Aujourd’hui rédacteur en chef et animateur de l’émission le Grand Jury, sur RTL, Benjamin Sportouch semble comblé. La radio, la politique, mais surtout l’intimité. « La radio c'est une présence. Cela vous accompagne dans votre journée ». Chaque dimanche à midi, l’ancien diplômé invite une personnalité politique dans la salle à manger des français, pour la cuisiner. Mais toujours à feu doux. Le but est évidemment qu’elle se livre.
Interview réalisée par Antoine BEAU (Etudiant IEP)
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